L’autre jour, en faisant du ménage, je suis tombé sur une lettre que j’avais écrite à mon Ex. La lettre exprimait la détresse à son maximum. Je ne me souvenais pas de son contenu et quand j’ai lu, je n’y comprenait pas grand chose. Ma pensée était loin d’être structurée. Ce dont je me souviens, c’est la blessure profonde que ça m’a fait.

C’était avant la crise du verglas de 1998. À l’époque de mIRC et des Chatrooms gais. J’avais 20 ans et dans le « Closet », comme on dit. Il s’appelait Sylvain et devait avoir dans la mi-trentaine. Dans un bar gai de Montréal, il m’avait lancé un « Pick Up Line ». Ça eu assez d’effet pour piquer ma curiosité. On avait joué au « Pool ». Il buvait sa bière sans dire un mot. C’était mon genre de gars. On se donnait des rendez-vous en ligne et dans la vrai vie. Je partais de chez-moi pour le rejoindre chez sa soeur, là où il habitait temporairement. Il revenait de Vancouver. Il m’avait dit avoir essayé de démarrer une compagnie de vêtements de ski alpin. Un beau projet qui n’avait pas fonctionné et là il voulait faire autre chose, suivre une formation pendant son chômage.

Quand la crise du verglas est arrivée, j’étais dans le triangle noir. Je travaillais chez Ernest à temps-partiel et j’allais au Cégep. Du jour au lendemain tout s’est arrêté, faute d’électricité. La soeur de Sylvain, s’inquiétant pour moi, m’offre d’aller m’installer avec eux le temps que ça se règle. Mon gérant me fait transférer à Montréal et je quitte mon père pour aller m’installer chez des « amis ».

C’était super! J’habitais avec une famille relaxe et tout le monde était gentil. Durant la semaine, je travaillais tout le temps. Sylvain travaillait à Val-Morin au camp Edphy. Le camp était vide mais quelques jeunes y demeuraient à cause de la crise. Le vendredi, Sylvain revenait et on passait la fin de semaine ensemble. C’était super! J’étais « All In » dans cette relation là. Je vivais mes premières expériences avec un gars en plus d’être dans un cadre familial qui acceptait ça. Je me sentais normal et ça allait m’encourager dans l’acceptation de mon orientation et pour la suite de ma vie. Ça m’a montré que c’était possible.

Après quelques mois, la crise du verglas a passée et je suis retourné chez mon père et au Cégep. Même si on se voyait moins souvent, ma relation avec Sylvain se poursuivait. Un jour, sans avertissement, j’ai appris par une connaissance que Sylvain et moi n’étions plus ensemble. Sylvain avait dit à cette personne qu’on s’était laissé « en bons termes ». J’ai essayé de parler avec Sylvain, sans succès. Un autre jour, sa soeur me dit que Sylvain est parti. Elle ne sait pas où. Il est juste parti, avec ses affaires. Elle le connait. C’est pas la première fois qu’il fait ça quand il se sent pas bien.

J’ai eu mal pendant des semaines. C’était insupportable, physiquement et mentalement. Sur le Chatroom, je voyais son pseudonyme apparaître… Et disparaître aussitôt. Impossible de lui parler. Impossible de savoir ce qui s’est passé de son bord. Impossible de savoir ce que j’avais fait. Je voulais lui rentrer dedans et m’excuser, sans trop savoir pour quelle raison. J’étais hystérique par en dedans. Je ne voulais plus rien savoir de personne. C’était l’enfer… Comme la deuxième et la troisième fois qu’on s’est fréquenté.